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Théâtre en Normandie

David Bobée est heureux, il le dit et ça se voit !

29 Mars 2015 , Rédigé par Vicaire François

David Bobée est heureux, il le dit et ça se voit !

A l'approche de sa deuxième saison qui ouvrira sur un manifeste autour de la culture sud-américaine et les grands courants baroques qui l'ont traversée, David Bobée le dit sans ambage : « Je suis heureux ».

Il peut, en effet, se targuer de l'être et d'avoir effectué en douceur et intelligence sa prise en main du Centre Dramatique National qu'on lui confiait.

C'était un pari…. Pour les sceptiques (il y en a toujours) mais pas pour lui qui est arrivé en maîtrisant une recette composée d'un bon quart d'ingrédients innovants, additionné de plus de la moitié d'une connaissance profonde de l'évolution du monde du spectacle et, pour la touche finale, d'un zeste de témérité bien comprise.

En fait, il lui a fallu une belle dextérité pour assimiler dans le même shaker trois éléments qui distillaient leur spécificité à l'intention de consommateurs pratiquement attitrés.

On le sait, de par la personnalité de ceux qui les animaient, « La Foudre » et les « Deux Rives » à quelques exceptions, avaient des publics respectivement fidèles à une enseigne, à un esprit, voire à une philosophie qui s'était construite tout au long d'une aventure théâtrale née dans l'après-soixante-huit.

En arrivant David Bobée a été confronté à une situation éclatée à laquelle on lui demandait de mettre en place une nouvelle cohérence à travers un travail commun. A cela près que, pour l'instant, le tryptique se trouve réduit aux seules « Foudre » et « Deux-Rives ». Le Centre d'Art et d'Essai, en effet, reste empêtré dans des problèmes technico-financiers qui le retardent encore pour un bon bout de temps et dont la réouverture est repoussée pour l'instant aux calendes grecques même si la maire de Mont-Saint-Aignan reste attachée au projet.

L'art de maîtriser le cocktail

Toujours est-il que le premier travail – la première mission devrait-on dire – de David Bobée fut de maîtriser un cocktail dont les dominantes pouvaient ou se marier harmonieusement ou se contrarier dans un malaxage confus dont l'arrière-goût d'amertume aurait pu faire capoter la recette.

Mais Bobée a eu le grand mérite de travailler en douceur et avec une diplomatie souriante mais tenace. Il a su jeter des passerelles entre les deux salles avec une vision bien précise de ce qu'il voulait faire sur le plan culturel pour son public et humain pour son personnel avec, en prime, le sentiment aussi de revenir sur ses terres pour en quelque sorte les ensemencer.

« J'ai trouvé deux équipes qui se sont réunies tout aussitôt et qui n'en n'ont fait rapidement plus qu'une seule et qui est animée de grandes bouffées d'énergie qui sont un véritable moteur. Le public de son côté suit le mouvement avec un intérêt croissant. La billetterie a éclaté et nous avons de superbes retours tout autant au niveau des propositions et des actions que de l'adhésion à une formule qu'on pourrait presque qualifier d'œcuménique tant elle répond à des aspirations tout à la fois multiples et complémentaires ».

Ce qui est étonnant chez ce jeune homme qui se dit paresseux et qui s'emploie à travailler vite pour passer très rapidement à autre chose, c'est que de metteur en scène, libre de toutes contraintes, sauf celles et ce ne sont pas les moindres de la création, il s'est engagé dans un processus où il lui faut s'accommoder d'impératifs financiers, sociaux, pour ne pas dire politiques et de s'y trouver parfaitement à l'aise. C'est même, semble-t-il une des clés de sa réussite au CDN et du bonheur qu'il y connaît :

« Je me sens très bien. C'est épanouissant – c'est même un bonheur rare – que de se réveiller le matin en se disant qu'il y a plein de choses différentes à mettre en chantier. Il est vrai qu'un spectacle peut changer le monde mais diriger une maison, lui insuffler une dynamique que l'on porte en soi, c'est extrêmement fort et c'est une manière de faire éclater les limites que la mise en scène peut, par la force des choses , juguler… Mener la culture là où elle n'est pas et poser de nouveaux jalons de réflexion est, en fin de compte, tout à fait compatible avec la direction d'une maison tout en poursuivant son propre travail de création »

Les millions de la production

Le budget du CDN est de 3 millions qui se partagent entre les principaux acteurs institutionnels de la région. A cela, il faut ajouter un élément déterminant qui est le million supplémentaire que génère la production. Et, cette année, la production c'est entre autres et surtout, cette « Lucrèce Borgia » qui pulvérise les records d'audience et de reconnaissance du public partout où elle passe en attendant la tournée internationale qui se prépare pour la saison à venir .

Là encore, il s'agissait d'un pari. Monter le père Hugo en est déjà un, mais demander à Béatrice Dalle d'endosser le rôle de Lucrèce en était un autre et ce n'était pas le moindre :

« En fait, je cherchais une comédienne sans jamais vraiment la trouver. Je me disais inconsciemment qu'elle pourrait être « comme » Béatrice sans qu'au début, je pense réellement à elle. Et puis, au fur et à mesure, l'idée a fait son chemin et s'est imposée au point qu'un jour j'ai pris le téléphone et je lui ai proposé le rôle. Je ne la connaissais pas personnellement et je savais qu'elle n'avait jamais abordé les planches. J'ai été surpris qu'elle mette juste le temps de la réflexion avant d'accepter. Mon fantasme venait de prendre corps ».

La réalité fut alors d'accomoder ce qui était encore une vue de l'esprit aux exigences d'un travail auquel la comédienne n'était pas encore rompue et dans lequel elle pouvait très bien, compte tenu de son tempérament, se montrer imprévisible :

« Je n'étais pas été inquiet. Béatrice a été épatante, disponible. Elle s'est intégrée tout de suite à l'équipe et à ce que j'attendais d'elle. C'est une merveileuse comédienne et ce fut un vrai bonheur de travailler avec elle… et ça continue ! »

On vous le disait. David Bobée est un homme heureux !

photo : Nathalie Labaye

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