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Théâtre en Normandie

« Magic » Charolles !

24 Mars 2015 , Rédigé par Vicaire François

« Magic » Charolles !

Tracer son chemin tout en sachant mettre ses pas dans ceux qui vous ont précédé pour mieux aller vers de nouvelles découvertes, c'est une manière de vivre la musique et de vivre tout court qui colle parfaitement bien à Denis Charolles.

Fort d'une imprégnation familiale qui passait avant tout par le jazz et nanti d'un D.U.T en électronique, il décida un jour que s'adresser à ceux qui préfèrent écouter de la musique plutôt qu'à ceux qui se bornent à l'entendre était une bonne formule et surtout une bonne disposition artistique.

C'est ainsi que, dans la fébrilité d'une ambiance rouennaise très riche en matière de sonorités et de rythmes, les « Musiques à ouïr ». sont nées d'un bonheur et d'un exigence … Bonheur d'abord de mener l'aventure avec des potes dont Christophe Moniot ne fut pas le moins important…. Exigence, aussi, de ne pas sombrer dans les habitudes, dans le « déjà vu » ou le « déjà entendu ». Pas question pour autant de négliger les leçons de l'antériorité mais, à travers elles, de façonner une nouvelle « matière » sonore ne ressemblant à aucune autre …. En quelque sorte, renaître dans une fécondité qui fasse revenir aux origines dans un acte de naissance permanent permettant d'accumuler de nouvelles émotions.

Comme dans ces bribes de mémoire qui se catapultent, il y a des choses qui restent et d'autres qui s'en vont. L'ensemble représente un patrimoine permanent que Denis Charolles entretient en collectionnant, dans un catalogue qui ressemble à une liste à la Prévert, des personnages comme Alexandre Rasse, Bertrand Couloume, Laurent Dehors, Loic Lantoine, Michel Portal, Marc Ducret, Eric Lareine, Julien Eil, Alexandre Authelain, Marie-Ange Cousin, Elise Caron, mais aussi Brigitte Fontaine et même Yvette Horner.

De tout cela et de tous ceux-là est né un parcours qui englobe des horizons au bout desquels se profilent des évocations de Brassens - qui a fait un « tabac » exceptionnel - jusqu'à Duke Ellington en passant par un « opéra vapeur » à Sotteville où il reviendra à l'Atelier 231 pour une « mémoire cheminotte » en compagnie de Victor Pognon. La dernière de ces aventures surprenantes – expérience devrait-on dire – est une adaptation de « L'enfant et les sortilèges » de Maurice Ravel. Il fallait une certaine dose de témérité pour s'attaquer aux musiques du père du « Boléro » et aux textes de Colette. Pour celle-ci, le problème a été vite résolu. Pour prendre ses distances avec l'histoire et une forme expressive qui date quelque peu, Charolles a fait un sort au didascalies du livret en leur substituant les évolution d'une danseuse. Par contre avec la musique, il s'est trouvé tout à fait en phase avec Ravel sous une formule « cabaret » qui colle bien au découpage de l'histoire et à un traitement résolument contemporain des voix. Ce sont quatre chanteurs (Charolles y compris) qui assurent une distribution renforcée par les choeurs de la maîtrise du Conservatoire dirigés par Pascal Hellot. Là encore, on retrouve chez Denis Charolles une sorte de volonté à triturer les esthétiques, à les plier à une interactivité qui s'inscrit dans une continuité se définissant au fur et à mesure qu'elle avance. Ce qui pourrait être une assez bonne définition de l'improvisation et c'est elle qu'on retrouve dans un CD qu'il a enregistré à Berlin pour « Jazzdor » avec David Chevalier et l'étonnante Maggie Nichols.

C'est un manifeste artistique dans lequel se retrouvent aussi bien Brassens qu'Otis Redding, Stevie Wonder ou Bob Dylan dans des « traitements » qui jouent avec les couleurs et les rythmes. L'ensemble se malaxe dans des improvisations qui derrière leurs constructions en apparence déjantées sont pensées, analysées et repassées ensuite, il est vrai, par le prisme d'une inspiration d'une totale et profonde originalité.

Chez Denis Charolles, il y a une volonté de transporter - et de transposer - les mélodies pour les libérer et les laisser s'envoler vers des « ailleurs » musicaux qui sont de fascinantes prédestigitation sonores.

Pas étonnant que la série dans laquelle le CD est sorti s'appelle « Magique » !

Photo : Sylvain Gripois

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